De la beauté

 


 

 

Parfois, je regarde un paysage, un lieu, un visage et je vois tout à coup jaillir une sorte de poésie et d’harmonie naturelle. Je le ressens. Ce n’est pas rationnel. Ce n’est pas forcément de l’art. C’est instinctif et intuitif. Je crois que c’est finalement ma vision de la beauté. Je sais que mon ressenti n’est pas universel. C’est ma sensibilité et mon regard sur le monde à un instant précis, et c’est très bien comme ça.
Je ne saurais pas forcément expliquer pourquoi je trouve ceci ou cela beau. Je fais confiance en mon intuition et en ma petite voix intérieure. Il me suffit de quelques secondes, quand je regarde une photographie par exemple, pour savoir si elle me touche.

Et dans tous les cas, l’explication vient toujours après l’émotion. Les mots tenteront de coller au réel, de rationaliser ce qui se passe à l’intérieur.
Cette entrée, et cette vue-là, me collent des frissons. Sûrement, le mélange de briques, de verdure, l’intérieur qui se fait extérieur, la douceur du velours des canapés bleus, la luminosité et ce minuscule lampadaire au dessus.

Ce dont je suis sûre, en revanche, est qu’assise au bord de la piscine, en regardant cette vue ; je me sentais heureuse, confiante et apaisée comme, à chaque fois, que je tombe nez à nez face à quelque chose de beau.

 

Alors, je cherche la beauté un peu partout, j’ouvre les yeux. Je guète et j’observe. Je crois au pouvoir de la beauté. Vous aussi ?

 

 

 

 

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Le Donjon, Etretat


 

Il se passe toujours quelque chose de particulier lorsque je dors, quelques jours, dans une maison d’hôtes ou un hôtel.

A l’arrivée, je suis toujours un peu impressionnée. J’ouvre les yeux. J’observe. Je ressens les espaces, les bruits, les matières. Je cherche ma place dans cet espace inconnu et j’essaie de comprendre la petite vie dans cet ailleurs. Son fonctionnement interne, ses codes implicites. Je tâtonne et je me fabrique des repères éphémères.

On est arrivés en début d’après-midi au Donjon. La veille, on s’était arrêtés dormir à l’Ile de Ré. On avait eu un temps incroyable et cela sentait bon les vacances. On avait mangé des huitres face au front de mer en imaginant les couleurs de la Normandie en juin. Quelques heures plus tard, on ouvrait les yeux pressés de découvrir Etretat. Sur la route, le jour se levait et je serrais fort ma chance de vivre ces instants-là.

Alors, durant plus de six heures, on a observé les couleurs du ciel au fil des kilomètres et des heures. On a croisé les champs à perte de vue, la mer et, entre deux averses, le soleil. On a fait un détour pour déjeuner à Honfleur et quand on a découvert le chemin, en début d’après midi, pour arriver jusqu’au Domaine Saint-Clair, on avait l’impression d’être au bout du monde. Perché sur les hauteurs d’Etretat, on découvrait notre nid normand pour les jours à venir.

Ce jour-là, on est restés au domaine et on a apprivoisé doucement le lieu. On a ouvert les yeux, dormi, lu, savouré un cocktail face à la cheminée, diné, dormi à nouveau. On a ralenti et on s’est laissé bercer par la douceur du Donjon.

 

 


 

Et puis, il y a cette première nuit qui transforme brutalement l’expérience. La première nuit où l’on découvre la douceur des draps, l’obscurité et la musicalité de la chambre. Où j’ai dormi, comme souvent, un peu mieux qu’à la maison sans me réveiller une seule fois.

Au réveil, il y avait la fenêtre, perchée sur les falaises, qui relie la chambre vers l’extérieur. Qui rappelle, brusquement, que oui, sa maison à soi est un peu loin et que le dépaysement est vivifiant.

Et puis, sans trop réfléchir, j’ai enfilé un short pour descendre prendre le petit déjeuner. Les pieds-nus, les cheveux emmêlés et les joues encore froissées par le des draps de la nuit : tout à coup, l’hôtel est devenu la maison. On est rentrés dans l’intime. On a mangé avec les doigts un croissant en sirotant un chocolat chaud. On a oublié les codes.

On était un peu chez nous dans cet ailleurs.

 

 

 

 

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Et regarder vers l’horizon


 
 
Cela fait un mois que je n’ai pas écrit ici. Un mois, des mois, que j’étais en apnée avec cette histoire de prêt qui symbolisait, symbolise, beaucoup à mes yeux.

Vendredi dernier, mon banquier m’a appelée pour me dire que le prêt avait été accordé. Depuis, le brouillard semble évaporé et j’ai l’impression de respirer à nouveau. De savoir, à nouveau, où je veux aller, comment je veux y aller. Cela faisait des semaines que j’avançais à tâtons en me répétant que j’aurais fait au mieux, que c’était la vie. Que, si le prêt n’était pas accepté, cela serait la conséquence de mes choix de vie. Que je le savais en me lançant à mon compte et que je ne pouvais même pas feindre la surprise.

Et puis, il y a eu cet appel et ce poids tout à coup envolé sur mes épaules. Cette idée rassurante que l’on peut être indépendante, entreprendre, et avoir un lieu à soi. Que je n’ai pas pris, il y a cinq ans, la trajectoire la plus simple mais que je me suis écoutée et que j’ai bien fait.

Alors, fin juin, je serai propriétaire et j’ai un sourire aux lèvres qui ne me quitte plus. Je serre ma chance d’avoir un banquier à l’écoute et qui s’est battu pour mon dossier. Je serre mon bonheur et j’ai hâte d’être le vingt-sept juin.

 


 
 
Quelques heures plus tard, j’ai pris la route. J’ai roulé des centaines de kilomètres en regardant vers l’horizon. Avant de partir, j’ai glissé un ciré jaune et une marinière dans la valise.

Un mois après le Portugal, j’ai repris la route dans l’autre sens : toujours l’océan, toujours les falaises, toujours le ciel changeant.

A dix-huit ans, un professeur m’avait confié que la véritable liberté, ce n’était pas d’avoir la majorité. Ce n’était pas un papier ou une histoire de date. C’était d’avoir la liberté d’aller où on le souhaitait, quand on le souhaitait et de la façon dont on le souhaitait. Il m’encourageait à être libre : à passer le permis, le baccalauréat, puis, à écouter mon intuition et à me construire une vie à mon image.

Souvent, quand je prends ma voiture et que je traverse la France ou l’Europe, j’y pense. Je suis dans ma petite voiture de rien du tout. J’ouvre les fenêtre, je monte le son et je vais où je veux. Je suis, je me sens, alors jamais aussi libre et à ma place que dans ces moments-là. J’oublie les dates, j’oublie les horaires et j’ouvre les yeux.

Douze ans plus tard, je sais qu’il avait raison.

 


 
 
Deux jours plus tard, j’arrivais au bout du monde, ou plutôt au bout de la France, en Normandie.

Je souris toujours quand je pense qu’aller à l’autre bout de la France en voiture est un peu comme aller au bout du monde en avion : la même fatigue, la même impatience, le même étonnement à l’arrivée.

A Etretat, je n’ai pas rencontré un ciel bleu. J’ai rencontré la magie de la brume, du bruit de la pluie sur la verrière et la mer déchainée. J’ai rencontré l’apaisement et la beauté du Donjon. J’ai ralenti brusquement. J’ai déposé les clefs de la voiture sur la commode de la chambre et je me suis promis du temps pour moi. J’ai fait le chat, avec le chat. Sans le chat. J’ai dormi. J’ai trinqué au crépuscule aux beaux jours et à ce projet à venir qui prend doucement forme et dont je vous parlais dans mon dernier article. J’ai rêvé, beaucoup.

Et j’ai pensé que cela ne pourrait pas être mieux qu’ici et maintenant.
 
 

 
 
 

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