
La lettre envoyée, les jours sont comptés. Dans quelques semaines, il n’y aura plus que des cartons qui s’accumuleront ici. Partir, c’est tout à coup se rendre compte comme on s’y sent bien. Comme on a finalement apposé nos marques ici. Une évidence qui secoue-bouscule-tourneboule. Je regarde nos murs comme si c’était la dernière soirée, la dernière nuit, le dernier réveil dans ces draps. A la fenêtre, je me fonds avec l’horizon. En deux ans, la vue sur les toits de la ville me fait toujours autant chavirer.
Il y a une certaine harmonie qui transparaît, un peu de « nous » dans ce petit appartement du dernier étage. A l’idée de partir, j’ai le cœur mordillé. Une pelote dans le creux du ventre. Je ne pensais pas que j’aurais pu m’attacher en si peu de temps à une ville, y être heureuse. En quittant Toulouse, je laissais du vide, des liens serrés. On a jeté des kilomètres avec ceux qui comptent.
Et puis, peu à peu, on s’est abandonnés au lieu. A la ville. On a épongé le manque. L’appartement est devenu notre boussole. L’université, le bar du bout de la rue. Le marché le dimanche matin, le restaurant sur la petite place, la piscine, la salle de cinéma à deux pas. Les nouvelles rencontres, les verres pris, les cours. Un quotidien s’est installé, nous a accompagné durant deux ans. Deux années où les mois ont glissé et où j’ai terminé mon cursus universitaire.
De Poitiers, j’en conserverai une douceur de vivre, une certaine facilité pour s’accrocher au lieu. Une vie simple. Je me souviendrai de la bruit de la pluie sur le toit la nuit, de la couleur du ciel au printemps et des soirées à réviser accompagnées par le murmure de la ville. De ses parcs en été et de son atmosphère féerique en hiver. De Poitiers comme une ville qui s’apprend qui s’apprivoise qui apaise.
Dans un mois, on s’envole pour le Sud. Recommencer ailleurs. Partir, lancer les dés, reconstruire et se tisser un nid. Voilà, ce qui nous attend et qui me donne le tournis. Tous les possibles sont ouverts. Mais, pour le moment, je m’accroche.











