Et, rester vivante


Ouvrir les yeux. Tirer les rideaux et observer, par la fenêtre de l’hôtel, les couleurs du ciel. Il est tôt. Six heures, peut-être sept. Il est tôt et il fait déjà chaud. Le ciel est rose-jaune-orange et éclaire le Vieux-Port. 

Vite, se glisser dans une robe et enfiler des nu-pieds. Vite, saisir l’appareil photo, le carnet rouge et le chapeau qui sent bon les beaux jours. Claquer la porte. Les yeux encore endormis, se retrouver, en tête à coeur, dans les rues de Marseille. 

Marcher, seule, le nez au vent. Marcher vers l’horizon bleu. Marcher et savourer le silence. Oublier les mots. Saisir la solitude. Croiser, sur le chemin, quelques pêcheurs s’affairer. S’étonner de leurs gestes minutieux et de la lumière dorée qui les enveloppe. Surtout, ne pas faire de bruit. Surtout, rester discrète. Observer le spectacle. Ouvrir les yeux. Puis, les fermer et tenter de capturer chaque détail et expression. Sentir le bonheur grimper en soi. Poursuivre la route. 

Marcher, le sourire aux lèvres, sans chemin tracé. Se rappeler que la destination importe peu face à la force du voyage. L’appareil photo accroché au cou, sentir le poids sur la nuque. Apprivoiser cette douleur presque oubliée. Photographier, rêver, respirer. Oser. Oublier la carte, explorer le territoire. Grimper. Prendre à gauche, puis à droite. A nouveau à droite. L’intuition en bandoulière, les désirs comme boussole. Etre égoïste. Monter les escaliers, encore. Le coeur qui secoue et le corps moite, ou peut-être l’inverse. Observer la ville et son horizon bleu qui s’éveillent, qui révèlent. Les yeux écarquillés, retrouver sa respiration, la joie et l’étonnement des premières fois. 

Vers neuf heures, s’arrêter boire un café face à la Vieille Charité. Ouvrir le moleskine et y déposer quelques mots et émotions. Sentir, déjà, le soleil brulant sur la peau. Serrer sa chance d’être là ici et maintenant. Se faire la promesse de voyager, à nouveau. De rester en éveil et de partir à la découverte du monde. De ne jamais se laisser engluer par le rythme effréné du quotidien, par les injonctions, par les « demain » qui n’en seront peut-être jamais. 

Et qu’importe si ce n’est pas raisonnable, si le moment n’est pas parfait – il ne le sera jamais -, si l’on ferait mieux de penser à la bise qui viendra ; qu’importe la vie est si précieuse, fragile et éphémère pour ne pas la saisir. 


Se faire la promesse de rester, toujours, vivante.

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C'est promis

Vos commentaires
sont des petites douceurs
Mille mercis à vous

    • J’ai pourtant l’impression d’avoir les mots tout rouillés. Je me dis qu’il faut que je prenne le temps d’écrire un peu plus par ici à nouveau.
      Merci <3

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      • Camille

        Merci pour ces mots si doux. C’est un vrai plaisir de te lire de nouveau par ici. Je suis allée à Marseille cet hiver et certains quartiers m’avaient aussi émerveillés.

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        • Il faisait très (très !) chaud et je n’ai pas pu visiter comme je l’aurais aimé. Il va falloir que je revienne. : )

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    • Merci beaucoup Anne. Une escapade et je me rappelle illico-presto combien les voyages sont essentiels à mon équilibre ET QU’IL FAUT QUE JE REPARTE VITE-VITE-VITE.

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  1. Les deux photos du bas respirent l’été et ses ombres si lumineuses :)
    J’ai souri en lisant « Sentir le bonheur grimper en soi. » C’est vrai que le bonheur n’envahit pas, il monte, les vertèbres comme un escalier. Plaisir de fureter.

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    • Merci beaucoup, c’est beau ce que tu écris.

      C’est je crois que ce que je recherche quand je prends des photos : créer des tableaux. Alors, oui, ce sont des tableaux d’été.

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